Carte Blanche Alice Diop – Reformuler
Est-ce que je peux pleurer pour toi ?
Production Festival d’Automne à Paris en coréalisation avec le CENTQUATRE-PARIS
La Fondation d'entreprise Hermès soutient la Carte Blanche Alice Diop – Reformuler
Installation de Véréna Paravel, Alice Diop, Hélène Frappat et Penda Diouf
« Une mère offre à sa fille un carton rempli de photos. Elles ont été trouvées dans une enveloppe scotchée dans l’album de mariage des grands-parents maternels, mélangées avec des photos de famille : communion, anniversaire, photos d’enfance de Verena en Algérie, au Togo, en Côte d’Ivoire, en Bretagne.
Alice ouvre la boite. Elle regarde les photos. Visages, douleur, souffrances. Sidération. Stupéfaction. Des scènes d’excision, de vulves offertes et exposées, des sexes qui saignent, des corps de fillettes qui s’apprêtent à se faire mutiler. Alice regarde celui qu’on ne voit pas. Elle devine l’homme blanc qui tient l’appareil. Un fonctionnaire colonial ? Un anthropologue ? Un médecin militaire ? Elle voit la toute-puissance, le regard qui déforme, la prédation. Un regard qui ne documente rien d’autre que sa propre violence.
''Une photo est toujours invisible : ce n'est pas elle qu'on voit...''
Verena aussi regarde au-delà̀ de cette lame de rasoir, dans le hors champ, elle cherche à interroger derrière l’œil blanc tout le régime oculaire colonial. Un malaise infini, un vertige nauséabond, et pourtant, étonnamment, naturalisé, banalisé. Car le mal devient toujours banal. Bien pire que les corps mutilés que cet homme fige sur ces films argentiques, il y a ce regard qui colonise des corps qu’aucune photo ne “capture”. Derrière l’objectif assassin, des hommes transforment ces images en photographies, en cartes postales, qu’ils vendent pour remplir les albums de famille des blancs.
Il s’agit alors pour les deux cinéastes de faire de cet album retrouvé le point de départ d’un travail commun. Le passé de l’une fait émerger les non-dits dans l’histoire de l’autre. Il s’agira des lors pour elles, d’interroger l’héritage colonial à partir d’une place située ; l’histoire d’une famille blanche en Afrique, celle d’une famille noire ; chacune marquée par ce poids de l’histoire. Ces récits mêlés, ce compagnonnage intime, cette quête et cette recherche commune donnera naissance a un objet hybride, inclassable, contre disciplinaire, qui empruntera à l’enquête, au documentaire, à l’essai, à la fiction, la peinture, la psychanalyse, au journal intime.
Cette présente installation, l’enregistrement de ces voix, donne à entendre une premiere matière, quelques intuitions, des premières pistes. »
Verena Paravel
Dans le même lieu
LIMINAL, Forensic Oceanography, Border Forensics From Sea to Sky
Exposant différents travaux des collectifs LIMINAL, Forensic Oceanography et Border Forensics, l’installation multimédia From Sea to Sky approche les immobilités intersectionnelles et violences frontalières en mer. L’objectif est de mettre en lumière la manière dont l’espace maritime méditerranéen a été transformé en une zone frontière militarisée.
Lawrence Abu Hamdan Zifzafa
Zifzafa est un mot arabe évoquant un vent qui secoue et ébranle tout sur son passage. Ici, il devient le titre d’une performance de l’artiste et chercheur Lawrence Abu Hamdan, qui mêle composition sonore, moteurs de jeux vidéo et spoken word. Il nous plonge au cœur d’un mouvement de résistance au colonialisme vert sur les hauteurs du Golan, territoire syrien occupé.
Alessandro Sciarroni U. (un canto)
Un an après la création d’IRIS à la piscine de la Butte-aux-Cailles, commande du Festival d’Automne dans laquelle il explorait le répertoire polyphonique italien, Alessandro Sciarroni présente U. (un canto), une performance musicale qui évoque la relation profondément mystérieuse entre l’être humain et la nature.
Lina Majdalanie, Rabih Mroué Quatre murs et un toit
En 1947, a lieu aux États-Unis le procès du dramaturge allemand Bertolt Brecht devant le Comité des activités anti-américaines (HUAC) chargé de lutter contre l’activisme communiste. Dans ces circonstances, Brecht avait rédigé une déclaration qu’il lui fut interdit de lire. Les minutes du procès, ainsi que cette déclaration, constituent l’un des axes de ce spectacle foisonnant.