Carte Blanche Alice Diop – Reformuler
Est-ce que je peux pleurer pour toi ?
10 – 12 novembrenov.
Production Festival d’Automne à Paris en coréalisation avec le CENTQUATRE-PARIS
La Fondation d'entreprise Hermès soutient la Carte Blanche Alice Diop – Reformuler
Installation de Véréna Paravel, Alice Diop, Hélène Frappat et Penda Diouf
« Une mère offre à sa fille un carton rempli de photos. Elles ont été trouvées dans une enveloppe scotchée dans l’album de mariage des grands-parents maternels, mélangées avec des photos de famille : communion, anniversaire, photos d’enfance de Verena en Algérie, au Togo, en Côte d’Ivoire, en Bretagne.
Alice ouvre la boite. Elle regarde les photos. Visages, douleur, souffrances. Sidération. Stupéfaction. Des scènes d’excision, de vulves offertes et exposées, des sexes qui saignent, des corps de fillettes qui s’apprêtent à se faire mutiler. Alice regarde celui qu’on ne voit pas. Elle devine l’homme blanc qui tient l’appareil. Un fonctionnaire colonial ? Un anthropologue ? Un médecin militaire ? Elle voit la toute-puissance, le regard qui déforme, la prédation. Un regard qui ne documente rien d’autre que sa propre violence.
''Une photo est toujours invisible : ce n'est pas elle qu'on voit...''
Verena aussi regarde au-delà̀ de cette lame de rasoir, dans le hors champ, elle cherche à interroger derrière l’œil blanc tout le régime oculaire colonial. Un malaise infini, un vertige nauséabond, et pourtant, étonnamment, naturalisé, banalisé. Car le mal devient toujours banal. Bien pire que les corps mutilés que cet homme fige sur ces films argentiques, il y a ce regard qui colonise des corps qu’aucune photo ne “capture”. Derrière l’objectif assassin, des hommes transforment ces images en photographies, en cartes postales, qu’ils vendent pour remplir les albums de famille des blancs.
Il s’agit alors pour les deux cinéastes de faire de cet album retrouvé le point de départ d’un travail commun. Le passé de l’une fait émerger les non-dits dans l’histoire de l’autre. Il s’agira des lors pour elles, d’interroger l’héritage colonial à partir d’une place située ; l’histoire d’une famille blanche en Afrique, celle d’une famille noire ; chacune marquée par ce poids de l’histoire. Ces récits mêlés, ce compagnonnage intime, cette quête et cette recherche commune donnera naissance a un objet hybride, inclassable, contre disciplinaire, qui empruntera à l’enquête, au documentaire, à l’essai, à la fiction, la peinture, la psychanalyse, au journal intime.
Cette présente installation, l’enregistrement de ces voix, donne à entendre une premiere matière, quelques intuitions, des premières pistes. »
Verena Paravel
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