Mark Andre Enno Poppe György Kurtág
E2 ...
28 novembrenov.
Mark Andre :
E2, pour violoncelle et contrebasse
Enno Poppe :
Stoff, pour neuf instruments
Haare, pour violon solo ;
Fell, pour percussion solo (2016)
György Kurtág :
Bagatelles op. 14d, pour flûte, contrebasse et piano
Brefs Messages op. 47, pour ensemble
Hannah Weirich, violon
Dirk Rothbrust, percussion
Ensemble Musikfabrik
Enno Poppe, direction
Coréalisation Théâtre de la Ville-Paris ; Festival d’Automne à Paris
France Musique enregistre ce concert.
Dans Stoff (Tissu) d’Enno Poppe, les neuf instruments entament une conversation animée où chaque voix veut se faire entendre, où tout le monde parle en même temps, avant de se retrouver parfois sur une même idée. Une sorte de « polyglossie » disparate, avec toujours les mêmes formules et idées fixes, de petits rythmes piétinés, de petites brèves mélodies, que chacun entonne en un concerto grosso fait d’apartés, arrêté de temps à autre par des « refrains » partagés. Une grande fanfare enthousiaste et déglinguée sera le fruit des délibérations, et puis l’on retombe, un peu épuisé. Dans Haare (Cheveux), le compositeur semble s’inspirer de la matière même des crins du violon solo : les courts glissés, les savonnages savants, les minuscules mélopées en micro-intervalles qui rappellent l’amour de Poppe pour les musiques d’Asie centrale, sonnent comme un test de résistance appliqué aux quatre cordes tendues.
Dans E2, Mark Andre met lui aussi la virtuosité de son écriture au service d’une microscopie des cordes. On imagine une oreille démesurée – façon Jérôme Bosch – s’approchant du violoncelle et de la contrebasse, envahis d’êtres minuscules qui s’y agitent, enfoncent des clous, déclenchent des vibrations ténues, des soupirs étranglés, des glissades. « Musique concrète instrumentale » encore, dans la tradition de Lachenmann, mais aux mètres réguliers, parfois presque dansante, subtilement éloignée, parvenant de très loin.
Les Bagatelles op. 14d de György Kurtág sont écrites pour un effectif improbable – flûte, contrebasse et piano. C’est tout le programme poétique du compositeur qui est résumé ici – moments fugitifs, intensité du presque-rien, des affects aussitôt stoppés, sur des rythmes impairs, des ostinatos, un choral furieux, des éboulis de gammes tonales… Brefs Messages op. 47 s’ouvre sur une petite fanfare de guingois, stravinskienne, précédant un « organum apocryphe » et deux instrumentations de pièces anciennes, composant un album mélancolique de musiques qui auraient pu être.