Marc François

As you like it

Archive 1991
T2G Théâtre de Gennevilliers – Centre Dramatique National
1 janvierjan.

As you like it
De William Shakespeare
Mise en scène : Marc François
Texte français : Jules Supervielle
Assistante à la mise en scène : Laurence Camby
Chorégraphie : Catherine Contour
Création musicale : Daniel Tosi
Dramaturgie : Anne Cornu
Décor : Jacques Dubus
Eclairages : Didier Girard
Costumes : Laurent Lamoureux assisté de Odile Trombetta
Maquillage et Masques : Chantal Bricault
Musiciens : Jean Michel Deliers, Denis Zaidman
Avec Pascal Andrès, Didier Bienaimé, Christian Caro, Noël Casale, Eric Champigny, Jean Davy, Bernard Dort, Philippe Gavlé, Marie Anne Kergoët, Vincent Rouche, Olivier Roustan, Gérard Watkins, Francisco Orozco, Alain Rigout, Bruno Sermonne

Ça commence. Toute la machine du théâtre. On raconte une histoire. Tout est faux. Mais on laisse faire, on est là pour y croire. Au bout d'un moment, on rentre dans l'histoire, on y croit. Les tissus et les masques et les voix et les gestes. On rêve aux personnages. On a oublié que c'était faux. A cet instant précis, les personnages s'exilent, changent de nom, de fonction, de sexe. L'acteur se voit. Dans son exil. Il le fallait. L'amoureux est perdu. Il veut appréhender l'autre, l'amour. Mais l'amour n'est plus le même, non plus. Il a perdu, entre temps, son apparence, son costume de gala. On ne le reconnaît plus, on ne sait à présent où il est. On cherche une issue. Le texte comme une partition répète pendant ce temps ces mots d'ordre : "Méfions-nous! Résistons! Plus d'amour fou!" Ça commence. Par les paroles d'un mort. Les personnages sont fatigués. Le monde est fatigué. Rosalinde, seule, s'impose en héroïne. Elle pressent la tragédie. Elle entraîne le monde vers la forêt. Le retour aux forêts, là où on se perd. Elle va trouver son père. Qu'elle ne cherche pas. Forêt d'Arden, forêt de la mère - de Shakespeare. Elle entreprend l'initiation de son amant qui ne la reconnaît pas en homme! Tragédie. Tout le monde dans la forêt "tombe" amoureux de lui, d'elle perdue. A la fin, l'acteur s'adresse au public, seul, Rosalinde s'est perdue dans la fête, elle est retournée au théâtre, il adresse un "galant adieu" à l'assistance. La prochaine pièce sera Hamlet. Il s'agissait d'une tragédie différée. Ça commence. A la Cité. Dans notre réalité. Les acteurs jouent nos rôles en quelque sorte. Puis ils fuient ce monde, défont leur costume, en revêtent d'autres, ambigus. L'histoire n'est plus la même. Tout devient jeu, avec le théâtre, entre eux, avec nous mêmes. Des hommes tentent le rite, parfois douloureux, dans la forêt, forêt imaginaire, paradis austère, traversé par des vents glacés. Entreprise surhumaine. Les corps, par errance, par tâtonnements, par tremblements suscitent des visions hallucinées : corps exemplaires, matrices informelles, asexuées, bisexuées, corps mythiques aux têtes animales, corps réconciliés, corps reliés, fulgurances d'on ne sait quoi mais qui ne nous est pas inconnu. Comme une vision futuriste, une reconnaissance. La représentation n'était pas là où on l'attendait. Ça n'est pas une "bonne pièce" dit l'acteur dans l'épilogue. A quoi, alors, avons-nous assisté avec ?

Marc François.

Dans le même lieu