Patrick Szersnovicz

L'écriture musicale, principal moyen de communication en Occident entre créateur et interprète, ne possède en elle-même aucune finalité propre. Elle n'est que l'étape indispensable d'un processus beaucoup plus vaste. Mais elle peut sans cesse jouer sur l'acte créateur, sur la pensée même du compositeur. L'exposition Ecritures Musicales est fondée sur cette interaction de l'écriture sur la pensée sonore.
Elle explore certaines régions précises de l'histoire de la musique dans un espace rigoureusement non-diachronique. Plusieurs phases, neurnes, notations mesurées, premières polyphonies, Ars Nova, Ecole franco-flamande, Madrigal, Tablatures, art instrumental du Baroque, grands auteurs classiques, romantiques et modernes (de Bach à Debussy), contemporains, seront ainsi confrontées les unes aux autres : en opposant directement des périodes diverses, on évaluera le développement constant des écritures d'« action » (comment produire le phénomène sonore) et de symbole (comment le décrire). Ces différents types de représentation (où la maturité de la pensée compositionnelle semble coïncider avec la maturité des systèmes de codes) oscillent entre une perspective pragmatique stricte (dont l'efficacité est le seul but) et une démarche davantage autonome (émancipation du graphique, par rapport au sonore).
Les documents présentés sont soit des manuscrits originaux dus à des copistes, (neumes, Ecole Notre-Dame, franco-flamands) soit des premières éditions imprimées - originaux et fac-similés (Josquin, Gesualdo, Monteverdi), soit des premières gravures (Frescobaldi), soit des manuscrits autographes fac-similés (Marc-Antoine Charpentier, JS Bach,...) et originaux (depuis Rameau, Haydn, Mozart, Beethoven, Schumann jusqu'aux contemporains).

Cinq concerts-illustrations complètent cette exposition, comme une représentation supplémentaire de ce parcours non-historique sur les notations, sur le mouvement constant qui, à travers les codes, sépare ou réunit l'écriture et le son.